Contrat de travail

Rediffusion de l’article paru le 13 avril 2021

Par un arrêt du 7 avril 2021 (à télécharger ci-dessous), la Cour d’appel de Paris vient de confirmer la position qu’elle avait prise en faveur de Deliveroo en novembre 2017, en rejetant la demande d’un livreur visant à voir requalifier son contrat de prestations de service en contrat de travail. 

Ce livreur, qui avait déjà été débouté en première instance par le Conseil de Prud’hommes de Paris, soutenait que les conditions tant contractuelles que d’exécution de la relation étaient caractéristiques d’un lien de subordination juridique permanente. 

Il affirmait notamment que la requalification de son contrat devait être quasi automatique en application des arrêts rendus par la chambre sociale de Cour de cassation au mois de novembre 2018 (Cass., soc., 28 nov. 2018, n°17-20079, Take eat easy ; voir : « Le travailleur indépendant d’une plateforme numérique n’est pas un salarié… sauf…. ») et de mars 2020 (Cass. soc., 4 mars 2020, n°19-13316, Uber ; voir « Affaire Uber : le travailleur indépendant et la possible requalification en salariat »).

La Cour d’appel de Paris, par une analyse approfondie des termes du contrat, des conditions d’exécution de la prestation et des éléments versés au débat par les parties écarte tout lien de subordination juridique permanente et donc l’existence d’un contrat de travail.

Elle fonde notamment sa décision sur le fait que les partenaires livreurs ont:

  • la liberté dans le choix de réaliser ou non des prestations selon leurs propres convenances ;
  • la possibilité de collaborer avec d’autres plateformes, ce qui était le cas en l’espèce du partenaire livreur qui collaborait avec plusieurs plateformes directement concurrentes de Deliveroo ; 
  • la faculté de sous-traiter leurs prestations de livraison…

La Cour écarte par ailleurs comme indices d’un lien de subordination juridique :

  • l’octroi d’une assurance gratuite qui n’est, selon la Cour, qu’une “amélioration” de la “situation matérielle” du prestataire ;
  • l’existence d’un système de géolocalisation qui est “inhérente au service demandé”.

Plus généralement, elle considère que les éléments mis en avant par le livreur à l’appui de ses demandes ne caractérisent pas une situation de contrôle, directives et sanctions propre au contrat de travail mais sont inhérentes à toute relation commerciale qui nécessite un suivi de la bonne exécution de la prestation. 

La Cour d’appel de Paris avait eu l’occasion d’adapter un raisonnement similaire à l’occasion des affaires Tok Tok Tok le 8 octobre 2020. La Cour d’appel de Lyon en avait fait de même le 15 janvier 2021 au profit de Uber.

Ces décisions sont en cohérence avec l’Ordonnance rendue par la Cour de Justice de l’Union Européenne le 22 avril 2020 (aff. n° C-692/19).

Les juges viennent donc rappeler la règle légale : 

  • le travailleur indépendant d’une plateforme digitale n’est par principe pas un salarié;
  • pour obtenir la requalification en contrat de travail il doit apporter des éléments de preuve de l’existence d’une situation de subordination juridique permanent
  • ces preuves de subordination ne peuvent se fonder sur des éléments généraux, non applicables à sa situation individuelle ou inhérents à toute relation commerciale avec une plateforme digitale. 
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